Bilan en travail de rue dans le quartier de Saint-Henri en 2023-2024
Faits saillants Population rejointe
Introduction
Beaucoup de changements dans cette dernière année. Le quartier de Saint-Henri a vu le départ de Laurie travailleuse de rue et Hugo travailleur de milieu, ainsi que le redéploiement de Catherine travailleuse de rue vers le quartier de Lachine/Ville Saint-Pierre. Malgré ses changements, beaucoup de travail a été effectué dans un quartier où les demandes et besoins sont constamment en hausse. Voici quelques constatations et réalisations de la dernière année, pour illustrer la réalité du quartier de Saint-Henri.
Milieu jeunesse
L’école secondaire de Saint-Henri est une structure assez impressionnante avec plus de 1100 élèves, dont plusieurs classes d’accueil et de francisation. Avec de nouvelles classes d’accueil, cela amène aussi un enjeu au niveau de la communication avec la barrière de la langue.
Au cours de l’année, nous avons rencontré de plus en plus de jeunes adolescent·e·s qui vivent de la détresse psychologique. La pression sociale sur les réseaux sociaux et les enjeux de performance scolaire, et avec une limite des ressources disponibles dans les écoles, tout cela accroit les facteurs de risque de ce phénomène d’impact psychologique.
Malgré la présence de la maison de jeunes La galerie, d’une bibliothèque et d’autres endroits susceptibles d’accueillir et divertir les jeunes. Nous avons pu observer, le soir, une augmentation de la présence de nombreux jeunes, flânant et traînant dans les rues. Pour la prochaine année, le milieu jeunesse recevra plus d’attention de notre part avec des objectifs bien établis tels qu’accroître nos liens significatifs avec les jeunes par une présence régulière dans les milieux de vie des jeunes de même que la poursuite de nos collaborations avec nos partenaires afin d’être en lien avec les jeunes et contribuer à répondre à leurs besoins.
Consommation
D’après nos observations et nos constatations, nous remarquons une légère augmentation de la consommation, surtout au niveau des amphétamines, ces derniers semblaient, au courant de l’année, plus accessible. Les autres substances demeurent toujours présentes sur le territoire avec le crack et les opiacés. Le matériel distribué a principalement été du matériel d’inhalation entre tubes en pyrex et pipes pour le crystal, avec aussi une augmentation continue de la demande.
Concernant, la consommation par injection celle-ci était visible à travers nos distributions, mais aussi le petit matériel à la traîne ici et là que nous ramassions dans plusieurs endroits éloignés des grandes artères. Au vu du matériel, il s’agissait des restes de consommation de stimulants et de médicaments opioïdes.
La consommation frénétique amène à une plus grande fragilité physique ainsi qu’à une augmentation de psychose, de délirium et de grande désorganisation. La santé mentale des personnes rejointes demeure fragile dans le quartier, celles-ci n’ont pas toujours accès aux services adéquats. En plus des enjeux sur la santé mentale, nous avons vu de nombreuses inquiétudes quant aux produits contaminés, phénomène en accentuation depuis la pandémie de COVID-19. La distribution de trousses de naloxone, principalement sous sa forme nasale ainsi que de bandelettes de détection du fentanyl se sont donc poursuivies comme les messages de prévention.
Plusieurs facteurs de risque augmentent la consommation (crise du logement, anxiété liée aux risques d’évictions, perte d’emploi…). Avec l’augmentation constante de la gentrification et du clivage entre les classes sociales cela rend extrêmement difficile la cohabitation entre les personnes consommatrices et les personnes non consommatrices. Les nombreuses interactions avec les citoyens du quartier nous confirment que la tolérance devient de plus en plus fragile.
Milieu adultes
Il est difficile de ne pas voir l’augmentation constante de l’itinérance et de la précarité auprès d’une partie de la population du quartier. Malgré, les efforts du milieu communautaire et notamment du travail combiné entre nous et de la Maison Benoit Labre, ils demeurent des besoins primaires non comblés pour les personnes rejointes. Nous devons faire face à un sentiment d’impuissance. Les demandes les plus courantes demeurent celles en lien avec le logement et tout ce qui touche à la consommation. Dans cette dynamique, le manque de réponse à court terme a eu pour effet de contribuer à la création et aux renforcements de liens avec les personnes.
La crise du logement, les augmentations de loyer abusives, les évictions… ont accentué le risque de l’itinérance dans le quartier. Plusieurs personnes rencontrées sont sur les programmes d’aide sociale ou de solidarité sociale, leurs finances ne leur permettent plus de répondre à leurs besoins de base, et malgré le soutien des organismes communautaires du quartier, les personnes sont de plus en plus proches de l’itinérance.
Conclusion
Le quartier Saint-Henri est en constante évolution. Malheureusement, la gentrification fait beaucoup de dommage auprès d’une partie des personnes vivant dans le quartier. La population en situation d’itinérance est à la hausse tout comme les demandes, nécessitant pour nous de prioriser afin de répondre au plus urgent. Au moment, où vous lirez ses lignes j’aurais accueilli Mélissa, nouvelle travailleuse de rue de Saint-Henri. Ensemble, nous avons comme objectif pour la prochaine année d’accorder plus de temps au volet jeunesse. Nous voulons également développer davantage nos liens avec l’école secondaire Saint-Henri. En observant tant de changements dans le quartier, cela ne peut que nous motiver davantage à arpenter les rues avec énergie et détermination afin de rejoindre les personnes ayant besoin de notre écoute, de notre aide et de nos conseils pour trouver des solutions. Nous avons plus que jamais le désir de faire une différence dans ce quartier riche en histoire.
Martin
Travailleur de rue à Saint-Henri